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Apporter du réconfort à nos patients

19.01.2023
Alexandra est infirmière responsable des soins généraux depuis 2 ans dans la maison de séjour et de soins « Beim Goldknapp ». C’est l’un des établissements de l’Association Luxembourg Alzheimer (ALA) qui accueille les personnes souffrant de démence. Alexandra nous fait part de ses motivations à exercer ce métier avec des personnes âgées, revient sur ses années d’études et partage la richesse de son quotidien avec les résidents et tous ceux qui les entourent.

Au moment de choisir vos études, qu’est-ce qui vous a motivée à devenir infirmière ?

Alexandra : En fait, je voulais devenir sage-femme et c’est en suivant la formation que j’ai décidé de devenir infirmière en soins généraux. J’ai toujours voulu être sage-femme et je suis allée au LTPS avec ce propos. Pendant la formation et avec les stages, j’ai découvert ce qu’était le métier d’infirmière.

 

C’est donc une décision qui a évoluée pendant vos études ?

Alexandra :  Exactement. Au cours de mes stages, j’ai vu ce qu’était vraiment le métier d’infirmière. Il y a beaucoup de fausses idées à propos du métier d’infirmière comme par exemple qu’elle est  l’assistante du médecin. Ce qui n’est pas vrai ! Le travail d’infirmière comprend aussi toute une liste d’actes¹ qu’elle peut entreprendre de manière autonome.

On travaille beaucoup sur prescription médicale mais il y a énormément de réflexions derrière, du savoir, du savoir-faire, du savoir-être. Ce qui est très important. Aussi, c’est le fait de ne pas voir le patient comme une maladie, une pathologie, on voit la personne comme un tout. Et donc c’est prendre en compte tous les volets, tout ce qui encadre la personne. Celle-ci n’est pas… « une jambe cassée », il y a aussi les autres aspects à regarder et à traiter. Et c’est lors des stages que j’ai remarqué mon intérêt pour travailler au quotidien avec les personnes âgées. C’est pour ça que j’ai renoncé à mon idée de devenir sage-femme et j’ai suivi la formation d’infirmière en soins généraux.

 

Il y a beaucoup de fausses idées à propos du métier d’infirmière comme par exemple qu’elle est l’assistante du médecin. Ce qui n’est pas vrai ! Le travail d’infirmière comprend aussi toute une liste d’actes¹ qu’elle peut entreprendre de manière autonome.

 

Et après vos études d’infirmière, vous êtes rentrée directement à l’ALA ou vous avez fait d’autres choses ?

Alexandra : Oui, directement. Donc j’ai terminé mes études et j’ai immédiatement postulé chez ALA. J’ai eu l’opportunité de commencer là. J’y travaille depuis 2 ans.

 

Vous avez donc été amenée à faire un stage dans ce type de d’établissement ?

Alexandra : Oui, chaque maison de soins a un service pour personne atteint de démence, mais ALA, c’est encore plus spécifique parce que ce ne sont que des personnes avec ce type de maladie. Ce qui fait que ALA est un peu différente des autres.

 

healthcareers.lu
healthcareers.lu

Vous travaillez de nuit ? Vous faites différents postes ? Comment ça se passe ?

Alexandra : Il y a 4 postes. Le matin, on commence à 6h et on termine vers 14h30. Il y a le poste de l’après-midi, de 13h30 jusqu’à 22h et la nuit, on commence à 9h45 et on termine à 6h15.

Les visites médicales se déroulent aussi différemment par rapport à d’autres établissements ; le 4e poste est de journée, de 9h jusqu’à 17h30 où le matin, on prépare les médicaments pour toute la semaine et l’après-midi, on fait la visite médicale, donc on présente les différents thèmes à discuter au médecin.

D’accord, souvent dans les hôpitaux, le médecin passe le matin…

Alexandra : C’est comme ça, parce que le matin je prépare les médicaments et en même temps, je note les ordonnances qui manquent. On essaye d’avoir juste un petit stock pour 2 semaines au cas où il y aurait un problème à la pharmacie, qu’on ne parvient pas à voir les médicaments à temps. Donc si je remarque qu’il n’y en a pas assez, je l’écris sur mon dossier pour avoir l’ordonnance et ça me permet aussi de voir les thèmes à discuter l’après-midi avec le médecin, de me préparer pour la visite.

Et vous, vous faites tous les postes ?

Alexandra : Oui. Cette semaine, j’ai encore 2 postes du matin et la semaine prochaine, je commence avec les nuits. Les semaines ne sont jamais identiques ! On passe du matin à l’après-midi et après, la nuit, ce n’est pas comme un poste de bureau !

Et comment vivez-vous ces changements dans votre vie privée ?

Alexandra : J’aime bien parce que ça me permet aussi d’être plus flexible pour mes rendez-vous ou d’autres choses personnelles, je peux toujours m’adapter. Personnellement, je préfère avoir une certaine flexibilité dans ma journée, dans ma semaine et aussi ce n’est pas toujours identique, c’est bien.

Je vais revenir sur vos années d’étude. Où avez-vous étudié et comment ça s’est passé ? Vous avez des petits souvenirs de vos années d’études, des choses que vous aimeriez partager ou que vous oseriez partager ?

Alexandra : J’étais au LTPS à Strassen. C’était très bien et intéressant parce que ce n’est pas juste la théorie, il y a aussi la pratique. On appelle ça « les labos ». Avant d’aller en stage et de pratiquer les nouveaux actes qu’on a appris à l’école, on devait s’exercer.

C’était le moment pratique. Et je me rappelle encore quand on a commencé les exercices pour les prises de sang, on préférait se piquer les uns les autres plutôt que les mannequins parce que ce n’est jamais la même chose. Donc voilà, on essayait de voir qui avait les meilleures veines pour essayer…

À quel moment avez-vous vu que vous préféreriez travailler avec des personnes âgées et que vous avez renoncé à votre projet de sage-femme ?

Alexandra : En première année, parce qu’on y apprend les choses de base, de soins, donc on est plutôt envoyés en gériatrie. Le premier stage, c’était en gériatrie aiguë, donc milieu hôpital, et après, c’était un stage dans une maison de soins.

Il n’y a pas beaucoup de stages en première année, mais ils sont en gériatrie et c’est lors de ces stages déjà que je me suis dit que c’était différent de ce que je m’imaginais, que je me voyais très bien là, que j’avais un contact facile avec les personnes âgées, que j’aimais bien. Très vite, j’ai renoncé à mon idée de devenir sage-femme.

On a assez de théorie et de pratique. Ce que je trouve super, c’est qu’on voit beaucoup.


Et c’est quoi ce contact exactement ?

Alexandra : Ce contact est riche parce que chaque personne a un vécu, un autre passé. Lors du soin, c’est aussi un moment pendant lequel on parle avec les résidents et… en fait, ils nous racontent beaucoup ! Parfois des histoires de vie bien compliquées, mais ils parlent aussi ce qui était bon dans leur vie, quand ils ont eu des enfants ou quand ils ont investi dans leur première maison… je ne sais pas, il y a vraiment beaucoup d’histoires et voir, à ces moments-là, la joie dans les yeux des personnes âgées qui nous racontent ça… et quand ce sont des histoires plus difficiles… c’est enrichissant, on apprend beaucoup avec les personnes âgées.

 

Ce contact est riche parce que chaque personne a un vécu, un autre passé. Lors du soin, c’est aussi pendant un moment lequel on parle avec les résidents.


À la fin de vos études, est-ce que vous vous sentiez prête à exercer ce métier ?

Alexandra :Oui, en fait, la dernière année, je n’attendais que ça ! Arrivée à la 4e année d’étude, de savoir bientôt qu’on sera sur le terrain en tant qu’infirmière ! Oui, tout à fait je pense que la formation m’a bien préparée. On a assez de théorie et de pratique.

Ce que je trouve super, c’est qu’on voit beaucoup. On n’est pas seulement en gériatrie, j’ai aussi fait des stages en maternité, en pédiatrie, j’ai fait des stages au bloc opératoire, dans différents services à l’hôpital. Donc on a une vue assez claire de ce que nous pouvons faire et oui, je me suis sentie tout à fait prête.

À quel moment avez-vous vu que vous préféreriez travailler avec des personnes âgées et que vous avez renoncé à votre projet de sage-femme ?

Alexandra : En première année, parce qu’on y apprend les choses de base, de soins, donc on est plutôt envoyés en gériatrie. Le premier stage, c’était en gériatrie aiguë,  donc milieu hôpital, et après, c’était un stage dans un maison de soins.

Il n’y a pas beaucoup de stages en première année, mais ils sont en gériatrie et c’est lors de ces stages déjà que je me suis dit que c’était différent de ce que je m’imaginais, que je voyais très bien là, que j’avais un contact facile avec les personnes âgées, que j’aimais bien. Très vite, j’ai renoncé à mon idée de devenir sage-femme.

À votre avis, quelles sont les qualités ou les compétences que vous n’apprenez pas à l’école et qui sont nécessaires pour que rester serein dans votre métier ?

Alexandra : La patience, bien évidemment. Même si ceci change d’une personne à l’autre mais cette qualité est très importante dans le métier. Mais aussi, être sûre de soi puisque on soigne des personnes qui nous font confiance. Et la façon d’exercer notre métier leur apporte du réconfort et de la confiance. Ils se sentent dans de bonnes mains.

Être sûr de soi, dans un certain sens, c’est aussi enseigné à l’école, puisqu’on a la théorie, la pratique et quand on sait faire quelque chose, on est plus sûr de soi, mais il y a aussi un peu du caractère de chacun.

Votre travail actuel, c’est comme dans un hôpital finalement au niveau de la composition des équipes : médecins, infirmières, aides-soignants, personnel pour l’hygiène… Quels sont les autres corps de métier ?

Alexandra : Ce n’est pas comme à l’hôpital où il y a beaucoup d’infirmiers et peu d’aides-soignants. À l’hôpital, on a toujours quelqu’un avec la même formation qui travaille avec nous. En maison de soins, c’est différent ; c’est aussi réparti en service, mais c’est une infirmière par service. C’est une autre responsabilité puisqu’on est seul. Il y a beaucoup plus d’aides-soignants qu’à l’hôpital et le médecin n’est pas présent ; il n’est pas à la maison de soins, donc ce n’est pas comme à l’hôpital. Ce n’est pas « s’il y a une urgence, vite, on appelle le médecin » et il est là sur place pour faire les prescriptions. Ici, on est seul, donc il faut être sûre de soi, savoir comment agir.

Il faut savoir évaluer la situation et le degré d’urgence. S’il suffît d’appeler le médecin, demander une visite sur place d’un médecin d’un autre service ou si une hospitalisation est nécessaire. Dans la maison de soins, il y a aussi les kinés, les ergothérapeutes, les psychologues, les aides socio-familiales.

L’une de vos attributions est de gérer l’équipe. Pour ce faire, avez-vous reçu une formation supplémentaire ou c’était inclus dans votre cursus ? Est-ce que vous êtes à l’aise avec ce rôle ?

Alexandra : Je n’ai pas de formation supplémentaire. Je l’ai appris de jour en jour, je pense, sur le terrain. Je suis à l’aise dans mon rôle de décision et je pense pouvoir le dire comme ça : j’ai la confiance de mes collègues aides-soignants ou aides socio-familiales aussi. Je me sens à l’aise et eux, ils viennent me voir en toute confiance quand il y a un doute.

 

Comment ça se passe quand vous n’êtes pas là ?

Alexandra : Il y a un autre infirmier qui fait le même poste et qui prend le relais. Il y a toujours un responsable d’unité ; chaque unité à son responsable qui est un infirmier, il ne fait pas les soins infirmiers mais tout ce qui est administratif.

Que voulez-vous dire par « pour nos patients, on devient une personne de référence » ?

Alexandra : On passe beaucoup de temps avec eux, donc forcément ils nous connaissent. Dans la maison où je travaille, c’est un peu plus difficile car ça dépend aussi du grade de démence de chaque personne. Certaines ne vont pas se rappeler de nous, d’autres, et ils sont nombreux, se rappellent, ils nous font donc confiance.

Par « personne de référence », c’est aussi pour les familles. Donc, quand ils appellent pour savoir comment va leur maman, leur papa, c’est bien l’infirmière qu’ils vont demander pour avoir des informations. Mais aussi, pour les autres professionnels. On est là tous les jours, on connaît chaque patient, son comportement, comment il va, comment se présente une douleur, à quel moment… donc, c’est dans ce sens-là, l’infirmière devient une personne référente pas seulement pour le patient, mais aussi pour tous ceux qui entourent le patient.

Combien de patients ou résidents bénéficient de vos soins actuellement ?

Alexandra : J’ai 2 unités qui comptent chacune 12 patients.

Quel adjectif utiliseriez-vous pour décrire votre relation avec les résidents ?

Alexandra : C’est une belle relation, oui. J’ai un bon contact avec mes patients. Parfois, c’est rigolo aussi, on rigole bien. Je ne sais pas comment le décrire… L’infirmière devient une personne référente pas seulement pour le patient, mais aussi pour tous ceux qui entourent le patient

Comment parvenez-vous à concilier vos tâches techniques et relationnelles ?

Alexandra : Je pense que ça vient naturellement. On va faire une prise de sang et bien sûr, on ne voit pas qu’un bras, il y a le patient qui est là, donc la conversation commence très naturellement. Ça enlève aussi un peu la peur que certains peuvent ressentir. Je prends l’exemple de la prise de sang, mais nos échanges enlèvent la peur, ça vient très naturellement. Parce que voilà, on ne voit pas qu’une pathologie, on ne voit pas un acte, on voit une personne dans son entièreté. Même quand je viens pour faire un soin, je vois une personne avec toutes ses sensibilités.

Quels sont vos défis quotidiens ?

Alexandra : La démence, ce n’est vraiment pas facile, c’est un défi en soi et ça se manifeste différemment chez chaque personne. Donc parfois, c’est avoir plusieurs patients en même temps qui ont besoin de notre attention. C’est bien un défi. Quand quelqu’un est désorienté et demande 10 fois, 20 fois la même chose et on essaye de trouver une façon pour la calmer et rassurer la personne.

Aussi, il faut être créatif et il faut avoir beaucoup de patience. Être créatif aussi dans une autre situation quand il y a des conflits entre personnes, à cause de leur confusion en fait. C’est aussi savoir gérer ça et de voir le bien de tous les résidents de la maison.

La visite des familles se fait à quel moment ?

Alexandra : Le matin ou l’après-midi, ils viennent quand ils veulent jusqu’à 20h.

Certaines proches peuvent avoir du mal à vivre la dégradation de leurs parents. Comment les aidez-vous ? Est-ce qu’ils ont un soutien ?

Alexandra : Oui, quand ils viennent en visite et qu’ils s’adressent à nous pour avoir des nouvelles et que, à ce moment, ils nous confient leurs sentiments. Bien sûr je suis à l’écoute… peut-être, ils ont vécu aussi un moment difficile avec leur proche pendant la journée. J’essaie de leur montrer que la journée ne se passe pas tout le temps comme ça, qu’il y a beaucoup de choses que la personne résidente sait encore faire, je leur parle des bons moments, j’essaie de projeter leur attention sur d’autres repères.

Aussi, à ALA, il y a des groupes de service d’aide dans lesquels les membres de la famille peuvent avoir beaucoup d’informations sur la démence. Il y a aussi d’autres groupes, des familles qui se rassemblent, ils voient comment ils peuvent s’entraider, échangent sur la façon dont ils ont vécu une situation spécifique et qui peut aider l’autre personne. Notre service psychologie peut aussi aider la famille, si besoin. On essaie d’aider la famille de différentes façons.

Pour en savoir plus, retrouvez le vidéo témoignage d’Alexandra.

  1. Les actes sont énumérés dans le Règlement grand-ducal du 21 janvier 1998